Le français moderne se distingue de l’ancien français par deux caractéristiques essentielles :

  1. sa relative fixité (due à l’école, l’imprimé, les médias, etc.),
  2. son homogénéité nationale.

Auparavant, chaque province, et parfois même chaque petit pays (du latin pagus) pratiquait sa propre forme et les usages (les mots, comme les conjugaisons ou déclinaisons) variaient à l’infini. Ce fut le français du Val de Loire qui finit par l’emporter sur les autres dialectes et fut à l’origine de la langue actuelle, sous l’influence des rois de France, qui y résidaient.

Les premiers textes dans une langue distincte du latin sont la Cantilène (ou Séquance) de Sainte Eulalie (premier texte littéraire écrit en langue romane vers 880) et le célèbre Serment de Strasbourg, signé le 14 février 842 entre les fils de Louis le Pieux (778, empereur en 814-840) qui se partageaient son empire ; Louis le Germanique (806-876) reçut la Germanie, Charles Ier le Chauve (823-877) la Francie et Lothaire Ier (795-855) la Lotharingie. Ce texte est le plus ancien connu en langue romane et en tudesque (vieil allemand).

Dès lors, à partir du IXe siècle, les textes littéraires, narratifs, épistolaires et diplomatiques se multiplièrent, ce qui permet aux historiens de la langue et aux linguistes de mieux connaître les étapes de l’évolution du français.

Les textes médiévaux disponibles nous renseignent sur le vocabulaire, souvent issu du bas-latin, pratiqué à la fin de l’empire romain, la prononciation et la forme des verbes (conjugaisons) ou la syntaxe de l’époque, bien que celle-ci soit encore mouvante, suivant les régions et l’origine ethnique des nouveaux habitants (après les invasions barbares des IVe et Ve siècles).

Apparu dans les textes au IXe siècle, mais vraisemblablement pratiqué par la population depuis plusieurs générations, l’ancien français fut d’abord largement imprégné de vocabulaire issu du bas-latin (c’est-à-dire bien différent du latin classique) et la grammaire était également largement influencée par le lutin, surtout dans les conjugaisons.

Réminiscence des déclinaisons latines (qui utilisaient six cas) ; l’ancien français connaissait deux cas : le cas sujet et le cas régime, sorte de génitif. Par contre, l’usage des particules, peu connu du latin, se développa, sous l’influence des langues germaniques (franc, alaman, burgonde, goth, etc.).

Le royaume de France fut longtemps divisé, sur le plan linguistique, en deux grandes zones de parlers différents : dans la partie méridionale, on parlait le langage d’oc (qui regroupait le provençal, l’occitan et bien d’autres idiomes d’Aquitaine), tandis que la partie septentrionale usait de la langue d’oil (qui comprenait, entre autres, le picard, le normand, le champenois, etc.).

Il convient de préciser que si le peuple pratiquait une langue dite « vulgaire » (du latin vulgus = peuple), les élites, principalement ecclésiastiques, parlaient (et écrivaient) dans une langue dite « savante », c’est-à-dire le latin, qui resta langue officielle des textes administratifs jusqu’à l’ordonnance de Villers-Cotterets, dite également « Ordonnance Guillermine », promulguée par le roi François Ier (1515-1547) en août 1539 et enregistrée au parlement de Paris le 6 septembre 1539.

Les verbes les plus usuels étaient alors les suivants : estre, avoir, aler, ardoir ou ardre (= brûler), boivre, chaloir (= avoir de l’importance), cheoir  (= tomber), crembre ou cremir ou craindre, croire, cuillir ou coillir, dire, doloir (= avoir mal), doner, ester, estovoir (=convenir), faire ou fere, férir (= porter un coup), haïr, joïr, loisir, manoir ou mandre (= rester), morir, movoirnuisir ou nuire, oir (= entendre), paroir (= paraître), plaisir ou plaire, pooir (= pouvoir), querre ou querir (= rechercher), savoir, sivre (= suivre), soloir (= avoir l’habitude), tordre, torner, tourdre ou tolir (= enlever), trover, vivre et voloir.

Autre particularité : le préfixe re- qui marque un mouvement en sens inverse ou une répétition, pouvait (jusqu’au XIIIe siècle) aussi signifier « à son tour », sens qui a aujourd’hui disparu.

Au XVIe siècle, sous l’influence de Marguerite d’Angoulême (1492-1849), sœur de François d’Angoulême (roi de France de 1515 à 1547) et les membres du groupe de la Pléiade, la langue française évolua et prit sa forme presque définitive. François de Malherbe (1555-1628) acheva de lui donner sa syntaxe et son vocabulaire.

Consulter

 

  • Guiraud (Pierre). – L’Ancien français. – Paris, Presses Universitaires de France, 1963. – In-8o, 128 p. (Collection “Que Sais-Je ?”, no 1056).
  • Raynaud de Lage (Guy). – Introduction à l’ancien français. – Paris, Société d’Édition de l’Enseignement Supérieur, 1966. – In-8o, 174 p.