Après la bataille navale de l’Écluse (24 juin 1340), piteuse défaite française, la flotte française était presque inexistante et parfaitement incapable de s’opposer aux Anglais. Ceux-ci ont menacé, pendant des siècles, de débarquer à tout moment et n’importe où sur les côtes du royaume de France. Il était donc nécessaire de surveiller en permanence le littoral.

Dès le XIVe siècle, un système de surveillance se mit en place, constitué de « guetteurs » et de « sonneurs », chargés de donner l’alerte à l’aide de trompes. C’était le « Guet de mer » ou « Guet de la mer ».

Par l’ordonnance de 1517, le roi François Ier (1515-1547) confia aux amiraux de France (juges des tribunaux maritimes, appelés Amirautés) la mission de surveillance des côtes. L’ordonnance de 1543 sur l’Amirauté prescrivit aux Amiraux de faire deux fois par an le recensement des hommes susceptibles de servir dans cette milice qui habitaient dans des paroisses dont le clocher était situé à moins de 2 lieues (environ 8 kilomètres) du littoral le plus proche. Ces paroisses étaient sujettes à la « milice des côtes » ; les hommes étaient contraints « à eux armer et embastionner », ce qui impliquait la construction de postes de garde.

Reprenant une idée de Mazarin, l’ordonnance de 1666 renforça les missions de l’Amirauté : chaque évêché ayant une façade maritime fut divisé en « capitaineries » regroupant plusieurs paroisses côtières ; les hommes furent regroupés en escouades, de fantassins et de cavaliers, puis en brigades ; plus tard, ces unités devinrent des « compagnies ».

L’ordonnance d’août 1681 (dite « Code maritime »), promulguée par Colbert, définit les obligations des capitaines et des miliciens de la garde-côte.

Mais ce fut surtout le Règlement du 12 mai 1696, promulgué par Louis XIV (1661-1715) qui donna son organisation définitive à cette milice : le service durait 20 ans (pour les hommes astreints, qui, en échange, étaient exemptés de la taille pour le reste de leur vie) ; le service concernait les hommes de 18 à 60 ans résidant dans les paroisses littorales de Bretagne, de Normandie et de Picardie, régions considérées comme propices aux incursions ennemies.

Les règlements de 1716 et de 1756 ne firent que préciser des points de détails (avec, toutefois, la création d’un corps d’artilleurs, pour servir des batteries côtières).

En 1738, Louis XV (1715-1774) créa un corps de « miliciens de la garde-côte » ; les paroisses littorales de tout le royaume (donc la façade atlantique jusqu’au Pays basque et les côtes de la Méditerranée) devaient chacune fournir un certain nombre d’hommes, défini par l’amirauté locale en fonction de la population active de la paroisse.

Après la Révolution et, surtout, l’instauration du Blocus continental (par le Décret de Berlin en décembre 1806), la surveillance côtière afin de prévenir toute incursion anglaise fut renforcée et le nombre de miliciens considérablement augmenté. Napoléon demanda au Ministère de la Marine de mettre en place un dispositif de surveillance des côtes : un officier d’artillerie Charles Depillon (1768-1805) avait proposé de construire des bâtiments de veille avec système de communication par signaux optiques (des bras articulés au sommet d’un mât) ; ce système fut adopté.

Sous le Second empire (1852-1870), les sémaphores furent réactivés dès 1862 et le Ministère de la Marine entreprit la construction d’une importante série de sémaphores (système de veille par des groupes d’hommes, chaque poste étant relié aux autres postes grâce au télégraphe optique de Chappe ; la transmission des signaux permettait de faire parvenir une information en quelques heures à peine à Paris). Chaque poste était construit à distance de vue du précédent et du suivant (soit environ une vingtaine de kilomètres, à vol d’oiseau).

Mais, en 1846, le système de télégraphe de Chappe fut remplacé par le télégraphe électrique qui gagnait en rapidité et en efficacité. En 1876 fut institué un Code international de signalisation maritime, destiné à uniformiser et normaliser les actions des services de secours maritimes des pays ayant accepté de coopérer, afin d’intervenir plus efficacement en cas d’accident maritime (« fortunes de mer »).

Au XXe siècle, les côtes de France sont équipées de 76 postes sémaphoriques au total, sur l’ensemble des côtes de France, de Dunkerque à Biarritz et sur la côte méditerranéenne, dont 8 en Corse, où ils avaient remplacé les anciennes « tours gênoises »), qui assurent des missions civiles et militaires. En 1970 furent créés les CROSS (Centres Régionaux Opérationnels de Surveillance et de Secours), dotés de puissants moyens électroniques. Après les catastrophes pétrolières des années 1970, en 1980 leurs moyens matériels furent renforcés et des dispositifs de navigation (dont le « Rail d’Ouessant ») furent mis en place.