Les Assignats

La situation financière de la France était tellement catastrophique, en 1789, que les députés aux États généraux étudièrent très tôt les mesures à prendre pour remédier au problème.

Malgré l’échec de la première expérience de monnaie fiduciaire (le Système de Law, qui mit en circulation, de 1716 à 1720, des « billets à ordre »), encore dans toutes les mémoires, le député Talleyrand (1754-1838) proposa l’idée de confisquer les biens du clergé pour les mettre « à la disposition de la Nation », ce que vota l’Assemblée Constituante, le 2 novembre 1789. Leur valeur fut alors estimée entre 2 et 3 milliards de livres (tournois). Puis le Trésor émit des titres d’emprunt, « assignés » (c’est-à-dire « gagés ») sur la valeur de ces biens nationaux. Une Caisse de l’Extraordinaire, chargée de l’émission et de la gestion de ces assignats, fut créée par une loi, votée le 19 décembre 1789, qui organisait également, pour débuter l’opération, une vente de biens du clergé à hauteur de 400 millions de livres. En attendant cette vente, on créa des billets dont la valeur était assignée (= gagée) sur les biens du clergé. Il s’agissait de billets de 1.000 livres, que seuls des investisseurs et spéculateurs pouvaient acquérir et utiliser.

En 1791, les assignats devinrent une monnaie de circulation et d’échange.  La loi du 15 mars 1791 ordonna l’échange des effets de la Caisse d’Escompte contre des assignats, qui devinrent alors le seul papier-monnaie officiel.

L’État, toujours à court d’argent, multiplia les émissions, d’où une forte inflation et la rapide dévaluation.  Entre 1790 et 1793, l’assignat perdit 60% de sa valeur. Pire, l’État imprima beaucoup plus d’assignats que la valeur réelle des biens en gages : en août 1795, il y avait 10 milliards d’assignats en circulation, 45 en janvier 1796, alors que les biens mis en gages n’en valaient que 3.

Plusieurs lois furent votées pour soutenir l’assignat, en vain. Dès le début de la Terreur, en septembre 1793, la non-acceptation de l’assignat comme monnaie entraînait la peine de mort. En novembre 1793, interdiction du commerce à l’aide de métaux précieux. En mai 1794, toute personne demandant en quelle monnaie était conclu un contrat était condamnée à mort. Etc.

De faux assignats furent imprimés en Belgique, en Hollande, en Allemagne, en Suisse et en Angleterre, ce qui accéléra l’échec et la crise économique. Le cours légal des assignats fut supprimé par la Loi du 2 prairial de l’an V  (21 mai 1797).