La force marémotrice

Pendant des siècles, les marins et les habitants des rivages maritimes de toute l’Europe observèrent les mouvements des marées, sans vraiment avoir l’idée de les utiliser pour en tirer une énergie quelconque.

Les moulins à marée apparurent au XIIe siècle, vraisemblablement sur la côte méridionale de l’Angleterre, sur le rivage du comté de Devon. Une anse de la côte, relativement fermée naturellement, fut mise à profit : un barrage fut édifié et, en son centre, une installation constituée d’une roue à pales entraînant des meules fut mise en place ; sur les côtés, deux vannes permettaient de contrôler le passage de l’eau. Le principe est simple : lorsque la marée monte, on laisse l’eau pénétrer dans le réservoir ainsi constituée par la digue de retenue ; à marée étale de haute mer, on ferme les vannes ; lorsque la marée descend, le différence de niveau s’accentue ; à marée basse, on ouvre les vannes : l’eau, libérée, entraîne la roue du moulin.

Cette énergie gratuite présente toutefois quelques inconvénients : le système ne fonctionne que pendant un temps limité, celui de la marée basse ; dès que le niveau remonte, la roue ne tourne plus. Malgré ces inconvénients, les moulins à marée se multiplièrent le long des côtes européennes (notamment en Bretagne) au cours des XIIe et XIIIe siècles. Beaucoup fonctionnèrent pendant de nombreuses années et plusieurs ne cessèrent leurs activités que vers le milieu du XXe siècle.

L’Usine marémotrice de la Rance, mise en service en 1966, reprend, avec des moyens modernes, le vieux principe d’utilisation de la force motrice des marées. Elle fournit de l’électricité à de multiples foyers de la région et devait servir d’installation pilote, voire de prototype pour de futures installations similaires, en d’autres endroits propices de la côte. Malheureusement, elle est restée à ce jour unique en France, sans doute en raison des problèmes d’ensablement de la rivière et de difficultés d’entretien.

Depuis la seconde moitié du XXe siècle, les autorités et collectivités territoriales (Départements et Municipalités, voire Régions) recommencent à s’intéresser à ces éléments importants du patrimoine local. Pendant des siècles, en effet, les moulins à marée ont fait partie intégrante du paysage et même de la vie quotidienne, puisque les cultivateurs des alentours venaient nombreux y faire moudre leurs grains.