La cartographie marine

La cartographie maritime est née au XVe siècle, lorsque les navigateurs flamands, hollandais, espagnols et surtout portugais commencèrent à parcourir le monde, à la recherche de nouvelles routes maritimes. Les récits rapportés de leurs voyages permirent l’élaboration de portulans, sortes de cartes qui suivaient le tracé des côtes et tous les noms de lieux étaient inscrits perpendiculairement à ce tracé.

Les portulans (du portugais portulanos, ou description écrite des côtes et des ports) étaient constitués d’un réseau de signes représentant la direction des vents, en 8, 16 ou 32 divisions les « marteloires »). Des roses des vents distribuaient des rhumbs (angle constant que doit maintenir la route du navire avec l’orientation de l’aiguille magnétique), que le navire n’avait plus qu’à suivre pour conserver son cap. Mais les portulans ne rectifiaient pas la déclinaison magnétique (angle formé par le Nord magnétique avec le Nord géographique). Ils étaient orientés selon la boussole (qui indique le pôle magnétique), et comportaient donc des erreurs d’orientation, donc sources d’erreurs de navigation pour les marins.

Déjà, au Moyen Âge, les cartographes arabes (Ibn Idrissi ou surtout Ibn Battuta, 1304-1377, le plus grand voyageur arabe) avaient dessiné de remarquables cartes des terres connues, ce qui impliquait des terres lointaines d’Asie, comme Java ou Sumatra et même la Chine.

Au XVIe siècle, une école de cartographie s’ouvrit dans la petite ville du Conquet (aujourd’hui dans le Finistère), sous l’impulsion de Guillaume Brouscon (dont la vie est mal connue ; il vivait en 1548). Les cartes étaient tracées sur des peaux de mouton (parchemins). Des familles de « faiseurs de cartes », comme les Brouscon au XVIe siècle, puis les Troadec au XVIIe, assurèrent une importante production.

Le havrais Guillaume Le Testu (1512-1572) fut l’auteur d’un remarquable atlas contenant 50 cartes marines peintes et enluminées, qu’il dédia à l’Amiral de Coligny, à l’issue de voyages au Brésil, au Pérou et dans les Caraïbes.

La cartographie connut un essor considérable avec Gerhard Kramer, dit Mercator (1512-1594), géographe flamand d’origine allemande, qui enseigna à l’Université de Louvain (en Belgique actuelle). En 1538, il réalisa une carte du monde qui lui valut d’être présenté à l’empereur Charles Quint. Mercator réalisa également un globe terrestre, ainsi qu’un globe céleste, remis à l’empereur en 1541. En 1554, il réalisa une grande carte d’Europe (à l’échelle 1/4 360 000) qui le rendit célèbre. En 1569, il publia la première grande carte marine du monde, dont le principe de projection est encore en usage de nos jours.

Les premières cartes fiables furent publiées par les ingénieurs de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales. En France, en 1693 parut le « Neptune français », ou « Atlas Nouveau des cartes marines ».

Les progrès des mathématiques et de la géographie, au XVIIe siècle, entraînèrent un regain d’intérêt pour les cartes décrivant les côtes des continents.

Les instruments de mesure, plus performants, comme l’astrolabe et le sextant, permirent la description plus rigoureuse des côtes. La France vit la création d’un corps d’ingénieurs cartographes. En 1720, fut créé le Dépôt des cartes et plans de la Marine et, en 1773, le roi Louis XV (1715_1774) lui accorda le monopole de la publication de ces cartes.

Des expéditions scientifiques, comme celles de l’anglais James Cook (1728-1779) ou des français Louis-Antoine de Bougainville (1729-1811) et Jean-François de La Pérouse (1741-disparu en 1786), entre autres, permirent le développement de ce type de cartographie et l’utilisation des coordonnées (longitudes et latitudes) apporta une précision sans cesse croissante.

L’ingénieur hydrographe français Charles-François Beautemps-Beaupré (1766-1854) fut à l’origine de l’océanographie et de l’hydrographie scientifiques. Son nom a été donné au navire océanographique de la Marine nationale, qui parcourt les océans pour les étudier et les cartographier.

Les progrès constants des mathématiques permirent également la mise au point de divers système de projection : Après celle de Mercator, utilisée au XVIe siècle, on employa la projection équivalente, puis la projection équidistante circulaire polaire, ou encore la projection de Petermann (aphylactique polaire ou en étoilée), etc. Au XIXe siècle, on s’intéressa à la mesure des profondeurs (ou « tirants d’eau »), à l’aide de sondes ; les cartes isobathes ou bathymétriques firent alors leur apparition.

En France, l’EPSHOM (Établissement Public Service Hydrographique et Océanographique de la Marine), basé à Brest, a pour mission d’établir et de tenir à jour les cartes des fonds marins et du tracé du littoral.